11 octobre 2013 : première journée française de la MH

3 novembre 2013

À l’initiative du Conseil scientifique de l’Association Huntington France (AHF), une journée a réuni familles, associations, médecins, chercheurs et partenaires institutionnels engagés autour de la MH le 11 octobre 2013, à l’Institut Curie.

Nous saluons celles et ceux qui, nombreux, ont fait le déplacement à leurs frais jusqu’à Paris pour cette journée qui a permis de prendre connaissance des dernières avancées de la recherche en France et dans le monde. Merci aux organisateurs de ce colloque où ont pu s’exprimer de nombreux intervenants (cliquez ici pour accéder au déroulement de la journée).

Comme l’a rappelé le Pr. Anne-Catherine Bachoud Levi, responsable du centre de référence de la MH, ce type de journées réunissant les professionnels de la MH, associations et familles avait été initié en 1998, et s’est essoufflé au fil des années avant d’être repris en main par Christian Néri au nom du conseil scientifique de l’AHF.

Pour une synthèse de cette journée, nous vous renvoyons au compte-rendu rédigé par Michelle, créatrice et animatrice de Huntington Forum. Qu’elle soit chaleureusement remerciée pour ce travail rigoureux mis à la disposition de tous.

Si d’autres participants à cette journée désirent partager leur propre regard et compte-rendu, qu’ils n’hésitent pas à nous contacter pour que nous le référencions sur cette page.

Le rôle des associations autour la maladie de Huntington

Lors de ce colloque, la question du nombre des associations liées à la maladie de Huntington a été soulevée. A l’instar de la plupart des maladies, on ne compte pas une mais plusieurs associations qui rassemblent des personnes concernées par la maladie de Huntington. Dingdingdong en présente quelques-unes ici.

A rebours des propos qui ont pu être tenus devant l’assemblée, Dingdingdong ne déplore pas une telle diversité du tissu associatif (ainsi que des initiatives parfois non associatives, tel le remarquable atelier de danse de la Pitié Salpêtrière). Ce n’est pas une, mais plusieurs associations qui ont été à l’origine des MAS qui prennent en charge des patients atteints de la MH. Pendant que certaines associations financent la recherche clinique, d’autres focalisent leurs actions sur le soutien aux familles et la plupart s’inscrivent profondément dans un tissu local que les grandes associations n’ont parfois pas les moyens d’appréhender.

Ces organisations sont en effet hétérogènes par leur organisation, leur fonctionnement, l’identité de leurs membres, leur taille, leur portée géographique et le type de projets qu’elles souhaitent porter. Avant d’imaginer comment fédérer et organiser cette diversité, nous pensons qu’il est indispensable de faire connaissance avec toutes les instances qui la compose.

Dingdingdong a fait le choix, dans son projet pour la Fondation de France d’établir une cartographie des forces associatives présentes en France. Cet état des lieux se fera dans le respect du travail de chacun et valorisera toutes les initiatives qui, chacune à leur manière, vise des objectifs convergents : soutenir les familles, soutenir la recherche, contribuer à une meilleure connaissance de la maladie par tous, favoriser une meilleure prise en charge etc.

Que toutes les associations qui œuvrent en ce sens puissent continuer dignement leur travail. Aucune ne doit se sentir « de trop », comme nous l’avons entendu lors d’une intervention.

Se rassembler dans la différence

Madeleine Akrich, Cécile Meadel et Vololona Rabeharisoa, dans l’ouvrage Se mobiliser pour la santé : des associations de patients témoignent, emploient le terme de « coalition » pour désigner l’ensemble des modes d’organisation interassociatifs quelle que soient leur dénomination : collectif, alliance, fédération, concertation, partenariat, coordination… L’engagement des associations dans des coalitions s’explique principalement par leur volonté d’étendre la mobilisation au-delà de la cause singulière que chacune défend. Un tel engagement renforce la visibilité et la crédibilité de l’action associative dans l’espace public.

Le temps est sans doute venu pour que chacun commence à réfléchir aux manières dont nous pourrions tous œuvrer pour une telle articulation interassociative autour de la maladie de Huntington, mais pour y parvenir, nous ne pourrons pas faire l’économie d’un moment de prise de connaissance mutuelle.

Zoom : le Dr Laurent Cléret de Langavant fait le point sur les aspects comportementaux au sein de la maladie de Huntington

Ddd souhaite saluer l’intervention du Dr Laurent Cléret de Langavant, dont la teneur nous a particulièrement réjouis. C’est en effet la première fois à notre connaissance que des notions que nous contestons, telles que la démence, l’anosognosie, l’apathie et l’irritabilité, et qui sont couramment citées quand il s’agit de décrire le comportement des personnes affectées par la MH, sont ouvertement nuancées.

En effet, Laurent Cléret de Langavant a souligné qu’il subsiste beaucoup d’à-priori concernant ces aspects comportementaux et cognitifs, quand bien même les médecins ont changé d’avis au cours du temps et de leur pratique. Il faut donc se garder des systématismes et tâcher d’avancer à affiner notre compréhension des symptômes comportementaux de la MH, et de leurs conséquences fonctionnelles.

La psychiatrisation exclusive de tels troubles, et toute la stigmatisation qu’elle entraîne, pourrait être diminuée voire évitée si l’on comprend mieux les tenants et les aboutissants de tels comportements. Ici, le mot « nuance » pèse très lourd car il s’agit en réalité de décomposer certains « blocs » symptomatologiques (apathie, irritabilité…) qui aplatissent en réalité des comportements infiniment complexes, reliés, mouvants, sur lesquels il est possible d’avoir une prise par une meilleure compréhension et un soin adapté, qu’il soit psychiatrique ou autre.

En fait, dit Laurent Cléret de Langavant, tout dépend de qui observe quoi et qui. L’apathie par exemple, dont on dit qu’elle est présente chez 50 % des malades (et qu’on associe à l’irritabilité), est justement complexe à identifier car elle se signale par des creux, des manques, une absence de certaines choses. Apprendre à décoder ces manques, à les relier à des contextes et à des situations, est une priorité pour améliorer la façon dont on peut les prévenir et y faire face.

Le suicide n’est pas non plus une fatalité. Un tel risque peut être prévenu de manière particulièrement efficace justement si l’on connaît les signes avant coureurs d’un mal être chez les personnes qui souffrent de la maladie de Huntington. Le suicide est présent chez moins de 1% chez les patients suivis par Mondor.

Comprendre les troubles du comportement chez la personne atteint de MH, ce n’est pas considérer que ces troubles ont strictement une origine organique (du fait des conséquences de la mutation), mais c’est par exemple nécessairement prendre en compte l’anticipation anxieuse liée au passé et à l’histoire familiale de chaque patient qui ont des répercussions psychologiques majeures. Bref de tels troubles comportementaux et psychologiques ne sont pas une fatalité de la MH vis à vis desquels on ne pourrait pas avoir de prise : c’est tout le contraire, ils peuvent être compris, et pris en charge de manière très efficace.

L’anosognosie : là aussi, L. Cléret de Langavant montre l’intérêt de reprendre et de re-affiner cette notion, non seulement parce qu’elle pourrait masquer une conscience, certes altérée, mais tout de même bien présente que le malade a de sa maladie, mais aussi parce que le fait de dire d’un patient qu’il est anosognosique le dépossède ipso facto de sa capacité à avoir une prise sur sa maladie. De plus, « la méconnaissance de troubles moteurs est un mécanisme normal », chez tout un chacun, MH ou pas (Justo, 2013). On ne se rend pas compte que l’on cligne des yeux quand on le fait, mais cela ne veut pas dire qu’on n’en a pas conscience par ailleurs ou que l’on est anosognosique. Il ne faut donc pas déposséder les patients de leur capacité de juger leurs propres troubles, qu’il s’agisse de symptômes moteurs ou cognitifs. Enfin, la présence et la nature de ces capacités dépend fortement des outils d’évaluation (échelles notamment) que l’on utilise pour les observer. Peut-être faudrait-il également affiner de tels outils afin de commencer à considérer avec plus de justesse la façon dont nos malades vivent et composent avec leur Huntington.


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