Jimmy Pollard, professeur de vie huntingtonienne

Par Alice Rivières24 août 2013

Dépêche toi… et attends !

Faire face aux troubles cognitifs de la maladie de Huntington dans les stades intermédiaires et avancés – manuel pour les aidants. Par Jimmy Pollard.

Texte original en anglais (USA) daté de 2008 et publié/diffusé à compte d’auteur sur lulu.com. Traduction française effectuée par Danielle Rivard, de la Société Huntington du Québec, en 2013. Hurry up and Wait (titre original) a été traduit dans une dizaine de langues.

Télécharger ici le pdf du livre de J. Pollard en français.

JimmyPollard

Ce livre est une petite révolution, pour ceux qui ont un patient ou un proche atteint de la MH, mais aussi pour ceux qui, comme moi, sont porteurs du gène et souhaitent s’initier en douceur au voyage si particulier qui les attend. Il a été traduit cette année par Danielle Rivard, de la Société Huntington du Québec – qui nous a autorisés à en relayer la diffusion, ce dont nous la remercions chaleureusement.

Toutefois la traduction effectuée en français du Québec pouvant légèrement dérouter, je recommande aux anglophones de lire le texte dans sa version originale (disponible sur lulu.com).

L’importance et l’originalité de ce livre résident également dans son style et dans son ton. Pollard est très souvent drôle et sensible, jamais ennuyeux ni sombre. Il écrit son texte à la première personne, s’impliquant profondément lorsqu’il nous livre son témoignage de soignant riche de plus de vingt années d’expérience auprès de patients MH au sein de nombreuses institutions américaines.

Pour toutes ces raisons, Jimmy Pollard est un merveilleux professeur pour ceux qui sont contraints d’apprendre à vivre le mieux possible avec leur singularité MH.

Comment pense un Huntingtonien ?

Pour nous faire comprendre, de l’intérieur, les difficultés propres aux huntingtoniens, Jimmy Pollard emprunte comme fil conducteur leurs troubles cognitifs.

Chemin faisant, il re-ouvre un grand nombre de « boîtes noires », ces notions qui sont très souvent évoquées lorsqu’il s’agit de MH mais qui ne vont pourtant pas de soi : l’irritabilité, l’impatience, l’apathie… D’autant que pour Pollard, les malades se rendent compte de tout ou presque de ce qui leur arrive (p. 96, 142-143). C’est fondamental car cela implique que la plus grande part des troubles comportementaux et psychiatriques des malades (dépression, anxiété, apathie, irritabilité, violence) n’est pas créé ex nihilo par la maladie elle-même mais découle des difficultés cognitives liées à la progression des perturbations cognitives qui lui sont liées.

Les vertus de l’anticipation

Pour Pollard, l’anticipation est la clé pour vivre le mieux possible avec Huntington et avec les huntingtoniens. Si nous comprenons mieux les difficultés cognitives de nos « HD folks » – « nos copains MH », comme il les appelle, alors nous pouvons, avec eux, anticiper un nombre incroyablement étendu de problèmes et diminuer d’autant beaucoup de conséquences pénibles qui en découlent. Comme les merveilleux soignants de l’Institut Atlant à Apeldoorn aux Pays-Bas (voir notre note à ce sujet ici), Pollard place l’anticipation au centre de tout bon système de care pour les MH, proposant même un système en 5 A (pour 5 Actions) – comme chez nous les bonnes andouillettes : Anticiper -> Accepter, Accorder, Adapter, Ajuster.

Des conseils valables partout, à la maison comme ailleurs

Pollard ne préconise pas nécessairement de créer des lieux ad hoc pour accueillir les malades Huntington, mais au contraire de se baser sur le système existant en trouvant des manières d’adapter nos manières de faire qui ne nécessitent pas forcément un équipement très compliqué, ou en tous cas inexistant à l’heure actuelle (autrement dit : on peut toujours faire mieux avec ce qu’on a, ce qui est un antidote fondamental vis-à-vis du sentiment d’impuissance de la plupart des proches).

Enfin, il évoque volontiers des choses très rarement abordées dans la littérature MH, avec beaucoup de finesse, telles que la sexualité, la cigarette, les plaisirs quotidiens.

Pour toutes ces raisons, Hurry up and Wait devrait être lu par tous, malades, porteurs, à-risque, proches, aidants, soignants, médecins, travailleurs sociaux et j’en passe ! Il devrait également faire l’objet d’actualisations régulières auxquelles nous pourrions tous participer. Pollard lui-même, dans son texte, appelle de ses voeux des études et des témoignages afin de continuer de mieux comprendre les phénomènes si complexes et si passionnants de la MH, du point de vu de leur vécu. Il ne tient qu’à nous d’entendre cet appel.

Alice R.


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